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Si c’est à Paris en 1964 que Sophie AGNEL est née, c’est vers d’autres îles sonnantes et au cœur d’une temporalité réinventée qu’elle se meut aujourd’hui, à la poupe d’un piano intégral, instrument dont elle a fait un véritable organisme vivant et vibrant. De formation classique, échappée du jazz (duquel le trop strict traitement de l’harmonie l’a détournée), Sophie AGNEL aborde le piano sous tous les angles sonores qu’offre ce navire musical : clavier, cordes et cadre sont appréhendés simultanément, dans une démarche mixte (comme on le dit de certaines techniques en peinture) qu’il serait réducteur de rabattre sur la définition cagienne de piano préparé. Envisageant l’instrument – qu’elle étend par maints accessoires, gobelets, boules ou cordes – comme un poétique pourvoyeur de matières et textures anamorphiques, la musicienne l’amène à faire jeu égal avec les dispositifs musicaux les plus divers, de quelque lutherie qu’ils relèvent (du physiologique à l’électroacoustique)… On ne s’étonnera donc pas de constater ses ententes avec Michel DONEDA et de la retrouver aux côtés du saxophone mouillé d’Alessandro BOSETTI, de la guitare électrique acoustifiée d’Olivier BENOIT, des voix de Catherine JAUNIAUX et de Phil MINTON, ou du clavier de Christine WODRASCKA… C’est du même sceau de l’évidence esthétique que sont marqués tous ses compagnonnages, de ce même goût, au-delà du narratif, pour les délicates recherches sonores et les surgissements d’univers auxquels l’auditeur participe par une écoute active : au cœur des mondes phonographiques de Jean PALLANDRE, du cinéma auriculaire de Jérôme NOETINGER & Lionel MARCHETTI, des tissus crêpés de John BUTCHER ou Axel DÖRNER, auprès des aimables machines d’Erikm ou Ikue MORI, des froissements harmonico-stratosphériques de Stéphane RIVES… L’originalité de la recherche conduite par Sophie AGNEL
l’amène à développer aujourd’hui, en solo ou en compagnie
significativement choisie, une approche sonore des plus raffinées et
hautement poétiques qui fait de chacun de ses concerts une construction
mouvante et fouillée de gestes musicaux ciselés, une somptueuse et douce
irradiation. Après quelques années de recherche, le piano de Sophie
Agnel s’est stabilisé sur un fil d’une infinie fragilité. Pour preuve,
Sophie Agnel passe la plupart de ses concerts debout, penchée en
équilibriste sur les entrailles de son instrument, lui triturant les
cordes pour qu’il crache jusqu’à la dernière goutte de son. Ce corps à
corps, elle en maîtrise les moindres recoins et le transfigure en un art
intransigeant et subtil.
Et puis parfois, au milieu de ces textures abstraites, une note. Pure.
Comme pour donner l’échelle, la profondeur de champ et la mesure d’un
univers sans concession mais dont la beauté est omniprésente. Il faut
certes perdre quelques a priori sur ce que c’est que « jouer du
piano » et accepter que le clavier n’en soit qu’une partie émergée.
Ce n’est pas si compliqué et une fois ce petit effort accompli, le
monde qui s’ouvre est sidérant.
Les frottements de cordes, les résonances, les effleurements des
étouffoirs, évoquent un paysage musical où le temps suit un déroulement
bien singulier et où l’espace est rempli de sonorités inouïes. Un voyage
passionnant dans le piano moderne. |
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If it’s in Paris that Sophie Agnel was born in 1964, it is towards other sounding islands in the heart of a reinvented temporality that she dwells today, at the stern of a grand piano, an instrument that she turns into a real living & vibrating organism. Classically trained, escaped from jazz (drawn away by the too strict treatment of harmony), Sophie Agnel boards the piano from every sonic angle this musical vessel can offer : keys, strings & board are simultaneously apprehended, in a mixed procedure (as we say of painting techniques) that would be understated if it was reduced to the cagian definition of the prepared piano. Considering the instrument – that she extends with several accessories, paper cups, balls or strings – as a poetic supplier of anamorphic textures, the musician takes it to be an equal match to the wider diversity of musical systems, whatever the craft they where conceived in (from physiological to electro-acoustic) ... We would then no longer be surprised to notice her understandings with Michel Doneda and to find her to the side of the wet saxophone of Alessandro Bosetti, of the acoustified electric guitar of Olivier Benoit, of the voices of Catherine Jauniaux and Phil Minton, or the keyboard of Christine Wodraska... The same seal of esthetic evidence marks all of her musical companionships, with this same taste, beyond the narrative, for the delicate sonic quests and blossoming of dimensions to which the auditor takes part through an active listening : in the heart of Jean Pallandre’s phonographic worlds, of Jerôme Noetinger & Lionel Marchetti’s small scale cinema, John Butcher or Axel Dörner’s crimpy tissues, by the lovely machines of Erik M or Ikue Mori, the harmonico-stratospheric rustling of Stéphane Rives... The originality of the research conducted by Sophie
Agnel today leads her to develop, in solo or with significantly chosen
companions, a most refined and highly poetic approach to sound that
makes each of her concerts a moving construction filled with chiseled
musical gestures, a soft and sumptuous irradiation. |
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